L’offensive indienne contre le Système


par Saïd Ahmiri pour le MecanoBlog

Si la nouvelle de la décision de l’Inde d’acheter le pétrole iranien avec de l’or, relançant ainsi le système du troc, ou des roupies se résume par un silence quasi complet et assez logique de la part des médias traditionnels occidentaux au service du Système en proie à son effondrement par auto-destruction et destructuration, il y a une autre affaire moins explosive que la première dans la perspective mondiale du système financier mais tout aussi intéressante dans l’approche du déréglement des relations internationales et du système international par une offensive d’un antiSystème. Cette seconde affaire pourrait, elle, s’ébruiter et concerne directement le choix de l’Inde d’acheter l’avion de chasse Rafale ainsi que les futures relations bilatérales entre la France et les Etats-Unis.

En 2007, le ministère de la Défense indien lance un appel d’offre, la compétition Medium Multi-Role Combat Aircraft (MMRCA), plus connue sous le nom MRCA, soit 126 avions de chasse à fournir avant 2020. Il s’agit d’un gigantesque contrat d’armement estimé entre 10 et 12 milliards de dollars. Le programme voit s’affronter six appareils : le Dassault Rafale, l’Eurofighter Typhoon, le General Dynamics F-16 C/D Falcon ou F-16 IN Super Viper, le McDonnell Douglas F/A-18E/F Super Hornet, le Saab JAS 39 Gripen et le Mikoyan MiG-35. Les sélections débutent en juillet 2009.

L’élimination du candidat russe dépend en grande partie du fait que l’Indian Air Force utilise déjà des MiG-29 et l’Indian Navy des MiG-29K. « En plus, l’Inde possède également des Soukhoï Su-30MKI russes et participe avec la Russie au développement du programme PAK-FA. Le choix du MiG-35 conduirait l’IAF à la perspective de ne dépendre que d’un seul fournisseur. » [1]

Si l’élimination des deux candidats états-uniens marque un intérêt particulier pour le MecanoBlog, c’est principalement pour ses études de la compréhension du déclin des Etats-Unis ainsi que de la nature du Système et son effondrement en cours. Pour l’aspect technique de l’élimination de ces deux appareils états-uniens, on se référera aux brèves explications de l’expert indien Ashley Tellis détaillées dans un article de la publication du Carnegie Endowment :

« Selon Ashley Tellis, les priorités de l’Indian Air Force dans l’appel d’offres MMRCA sont les capacités au combat aérien et les performances aérodynamiques. Or, le F-16IN Super Viper dont les réservoirs de carburant sont déjà limités, affiche un taux de virage assez faible qui nuit à sa manipulation et à ses performances. Le F-16 souffre également d’un faible potentiel d’évolution, et d’un risque d’obsolescence d’ici 15 ans.

Idem pour le F/A-18 E/F Super Hornet, dont les problèmes d’accélération sont connus, et dont la maniabilité ne sera jamais équivalente à celle du Rafale, de l’Eurofighter, du Gripen, ou du MiG-35. » [2]

De plus, le F-16 de Lockheed Martin est déjà exploité par le Pakistan, ce qui à joué contre lui depuis le début.

La condescendance habituelle de Washington

Suite à l’élimination des deux candidats états-uniens, le F-16 C/D Falcon ou F-16 IN Super Viper de General Dynamics et le Super Hornet F/A-18 de Boeing étiqueté du titre de l’un des plus mauvais avions de combat actuellement en service et proposé sur le marché, dans la sélection de la compétition MRCA, le 31 janvier 2011 « Defense News mettait en ligne […] un long article présentant l’affaire du JSF-Inde, sans noter la mise au point du désintérêt indien, insistant au contraire sur l’importance grandissante des relations stratégiques nouvelles des USA avec l’Inde. En plus de l’affaire JSF, l’article annonçait une amélioration décisive des offres US déjà faites pour le programme MRCA, lesquelles offres semblaient ainsi devoir assurer une victoire US déjà inscrite dans l’évolution des rapports USA-Inde, vus de Washington… » [3]

C’est ainsi, en remplacement du F-16 et du F/A-18, que faisait son entrée dans la compétition MRCA le F-35 Lightning II de Lockheed Martin dit programme JSF ou le plus catastrophique programme aéronautique des Etats-Unis dont les boires et déboires sont si nombreux qu’il faudrait écrire un livre pour toutes les retranscrire. Une entrée qui a fait beaucoup de bruit, et seulement du bruit, assez naturel dans la com’. En effet, Dan Goure « présentait l’affaire « JSF pour l’Inde » comme une étape essentielle du développement de l’alliance stratégique entre l’Inde et les USA, à l’avantage de l’Inde, « la plus grande démocratie du monde »… » pendant que Loren B. Thompson, également du Lexington Institute, puissant lobby du complexe militaro-industriel états-unien, osait littéralement écrire que c’est « l’Inde qui demandait constamment depuis quelques temps de participer au programme JSF ». Et « cela trois jours après que l’Inde ait clairement et officiellement démenti le moindre intérêt de sa part pour le JSF ».

Dedefensa rajoutait dans son analyse de cette affaire qu’« après avoir stupidement ignoré ces demandes, le Pentagone comprenait enfin l’intérêt de la chose, – clairement dans la perspective d’une alliance stratégique entre les USA et l’Inde contre la Chine, l’Inde jouant le rôle de tampon et de première ligne face à la Chine, pour le compte des USA selon un livret classique de l’opéra-bouffe stratégique. » [3] Le Pentagone espérait ni plus ni moins faire de l’Inde un vulgaire pion dans l’endiguement de la Chine mais les Indiens ont très vite compris ce petit jeu. C’était sans réaliser ou prendre en compte les bouleversements géopolitiques mondiaux de ces dernières années. Du déni ou du mépris ?

L’élimination des deux candidats états-uniens a été ressenti comme une énorme défaite stratégique par les Etats-Unis. Et la décision de ne pas montrer « le moindre intérêt » pour le F-35 Lightning II n’a évidemment pas manqué de faire grincer des dents à Washington, un grincement sans doute (peu ?) comparable du côté indien pour le retrait, considéré prématuré, des troupes états-uniennes/atlantistes du bourbier afghan.

Persistant alors dans leurs vains efforts et au bon service de la corporacratie états-unienne, la secrétaire d’Etat Hillary R. Clinton s’envola pour New Dehli et proposa une offre pour le moins tout aussi alléchante qu’incroyable, « un choix du F-16 ou du F-18 par l’Inde, pour une partie de la commande, se poursuivant avec le JSF enfin parvenue à maturité stratégique, – c’est-à-dire volant opérationnellement » à « un prix incroyable de $65 millions par exemplaire » [4], soit quatre fois moins cher que les 28 premiers avions de série de $234.5 millions l’exemplaire pour le Pentagone, l’USAF et, bref, les Etats-Unis d’Amérique ! L’Inde semble s’être naturellement (et temporairement ?) attirée les foudres du complexe militaro-industriel et Washington s’est attiré bien plus que les foudres de son propre complexe militaro-industriel. Comprenez l’évidente tension entre le complexe militaro-industriel des Etats-Unis et Washington qui alimente encore la destructuration du Système.

Rahul Roy-Chaudhury, directeur de recherche pour l’Asie du Sud à l’International Institute of Strategic Studies, déclarait à propos des raisons, prenant en compte l’aspect technique ainsi que les relations bilatérales indo-américaines, de l’élimination des deux candidats états-uniens :

« [Notre] armée de l’air était focalisée sur la recherche d’un avion qui serait supérieur, et l’avion américain proposé n’était tout simplement pas à la hauteur. On a été surpris en Inde de l’ampleur de la déception américaine […] L’état d’esprit indien était que ce contrat ne devait pas être une question servant à cimenter leurs relations, mais d’obtenir le meilleur accord. Le point de vue indien est que les Américains auraient dû proposer un meilleur avion. » [5]

L’analyste aéronautique Richard Aboulafia, vice-président du Teal Group, allait dans son sens pour l’aspect relationnel en déclarant :

« Si les Etats-Unis avaient véritablement réformé leurs processus et dit aux Indiens, « Vous êtes nos partenaires, vous êtes nos égaux », alors le F-18 aurait eu une très forte chance. C’est l’approche adoptée par les Européens – ils sont venus et ils ont dit, « Nous avons besoin de vous ». J’espère que cela sera pour eux un rappel brutal à la réalité. […] J’espère que [les Américains] en tireront une leçon. » [5]

Ce « rappel brutal à la réalité » pouvant notamment se traduire par, en petite partie, le comportement de « gentlemen » à adopter envers un client, et par, en grande partie, la redéfinition des partenariats et alliances en ces temps complexes ainsi que le rééquilibrage de puissances à l’échelle planétaire, en somme la multipolarisation du monde auquel le déclin des Etats-Unis s’inscrit bien évidemment.

Toujours dans son article intitulé « Why India chose to disappoint the US », Trefor Moos, journaliste indépendant qui couvre la politique asiatique, en particulier sur les questions de défense, de sécurité et d’économie, nous faisait part à cette époque guère lointaine de ses pertinentes considérations :

« Aboulafia fait remarquer que les Etats-Unis n’ont pas non plus réussi à surmonter « l’héritage malheureux » de leur refus d’exporter des composants aéronautique cruciaux vers l’Inde durant le conflit de Kargil, en 1999, avec le Pakistan. L’Inde avait besoin de garanties en béton que rien de tel ne se reproduirait et elles n’ont pas été accordées.

On a beaucoup glosé sur le refus de l’Inde d’accorder une faveur spéciale aux Etats-Unis dans ce cas précis, et quelques commentateurs ont applaudi le fait qu’il voient cela comme un retour de l’Inde vers ses racines non-alignées traditionnelles et un rejet du bloc stratégique indo-américain. Mais en optant pour un avion européen, l’Inde ne cherche pas à éviter de s’aligner sur les Etats-Unis. L’Inde est clairement alignée sur les Etats-Unis, mais comme partenaire, plutôt que comme client ; elle considère également que les Etats-Unis ne sont qu’un des divers partenaires stratégiques clés, plutôt que le seul allié qui compte ». [5]

Pourquoi le Rafale

Avec l’élimination des deux appareils états-uniens et le « désintérêt » indien de les remplacer par le F-35 Lightning II, la liste de cette autre puissance émergente asiatique aux côtés de la Chine se résumait donc aux avions de chasse Typhoon du consortium européen EADS à $125 millions l’exemplaire et le Rafale du groupe français Dassault à $85 millions l’exemplaire.

Si le Rafale, toujours invendu à l’étranger à ce jour, ni au Brésil, ni aux Emirats Arabes Unis, est parvenu à retenir l’attention de l’Inde, c’est notamment « grâce » à la guerre de Libye. Victor Kotsev, autre collaborateur du Asian Times Online, a écrit un long article sur les avions de chasse engagés dans le conflit libyen.

« Kotsev aborde la question de la « guerre aérienne » dans ce conflit, en y faisant une place particulière au Rafale et en établissant un rapport entre le comportement de l’avion français en Libye et sa présence dans la short list du marché MRCA. Kotsev cite un « expert des questions de défense » confiant à Reuters que l’affaire libyenne est devenue une « vitrine » dans une nouvelle course aux armements (ou aux exportations). […] Kotsev enchaîne alors sur une longue analyse du comportement des avions engagés en Libye, notamment et particulièrement celui du Rafale, en créditant ce comportement du Rafale d’être un argument majeur qui aurait guidé l’intérêt des Indiens pour l’avion. »

Je vous épargne cette fois les détails techniques de la préférence indienne pour le Rafale dans un milieu de guerre hautement montagneux mais rappelle que le Pakistan et la Chine ont mis au point un avion de chasse en commun, le chasseur léger multi-rôle JF-17 Thunder selon la dénomination pakistanaise, le FC-1 selon le nom chinois, produit à faible coût (moins de 20 millions de dollars). Simultanément, la Chine est désireuse d’acquérir l’avion de chasse de cinquième génération russe, le fameux Sukhoï Su-47. De plus, il faut noter que le Pakistan achète une grande partie de son armement aux Etats-Unis, dont le F-16. L’Inde se devait donc de se démarquer sinon, en cas de conflit, purement imaginé dans notre sujet, avec l’un ou l’autre voire les deux, la supériorité en combat aérien reposerait principalement sur l’habilité du pilotage et l’effet de surprise de l’attaque et non sur les performances de l’appareil, chose qu’aucun état-major qui se respecte n’oserait se permettre, préférant logiquement mettre toutes les chances de son côté.

Et, enfin, pour finir cette historique de la compétition MRCA dans ses grandes lignes et sur les conséquences de la décision d’éliminer les deux candidats états-uniens de la compétition MRCA, une autre petite remarque de Philippe Grasset sur le déclin de l’hyperpuissance états-unienne littéralement obligée de fournir une aide à l’acheteur pour se faire acheter ses engins de destruction parfois utilisés dans les bombardements dits humanitaires :

« Ce que le marché indien met d’abord en évidence, c’est la non moins extraordinaire décadence, sinon l’effondrement de l’industrie aéronautique US, – entre des modèles complètement dépassés et un hypothétique JSF qui devient l’archétype de la catastrophe industrielle. Si les USA vendent encore sur l’essentiel des marchés qu’ils prospectent en les tenant pour « captifs », c’est parce qu’ils exercent une pression stratégique et politique d’une puissance et d’un cynisme incroyables, et que la plupart de leurs interlocuteurs, en général regroupés dans les régimes soumis du bloc américanistes-occidentalistes (bloc BAO) et dans les régimes corrompus de leurs auxiliaires des marches extérieures (Moyen-Orient et Extrême-Orient), y cèdent évidemment, – d’autant que les « offres » US accompagnent souvent une aide financière US au pays concerné, aide financière accordée par un pays (les USA) totalement écrasé par une dette colossale. »

Pour la boutade, si Barack H. Obama est une star du marketing suite à sa campagne présidentielle de 2008, la palme d’or des VRP de la guerre revient à Nicolas Sarkozy qui serait vraiment un ingrat de ne pas aller se recueillir sur la tombe de Kadhafi pour lui avoir fourni une chance (inespérée ?) d’enfin pouvoir refourguer ses Rafale à une puissance.

« It’s nothing personal, it’s just business ! »

Ainsi, vous avez d’un côté l’Inde qui n’a pas digérée le comportement dédaigneux de Washington dans de nombreux dossiers (Af/Pak, favoritisme caractérisé pour le Pakistan, pion dans l’endiguement de la Chine, contrôle états-unien de la modernisation nucléaire) et qui envisage aujourd’hui de payer le pétrole iranien en or ou en roupie, en bref tout sauf l’euro-dollar. Depuis quelques années, son déplacement stratégique pour l’axe sino-russe se poursuit au grand dam de Washington. L’axe sino-russe a clairement déclaré sa volonté d’intégrer l’Inde à l’Organisation de Coopération de Shanghaï, mais aussi le Pakistan, l’Iran et la Mongolie partageant le même statut d’Etat observateur que l’Inde.

Et d’un autre côté, vous avez la France qui se dirige, ou du moins fait un modeste premier pas, dans une direction combattue par toute la constellation des unipolaristes, impérialistes états-uniens et autres gardiens du Système. Outre le fait que Paris avait déjà soulevé l’hostilité états-unienne dans l’affaire de la vente du Rafale au Brésil comme le fait remarquer Philippe Grasset, la décision de choisir le Rafale dans la compétition MRCA soulève une « question intéressante » ayant un grand intérêt pour nous mais surtout pour les futures relations bilatérales avec les Etats-Unis :

« La question intéressante que soulève le choix indien du Rafale est donc, dans la situation présente, de savoir si cet choix interfèrera ou non dans la politique française, notamment dans les relations entre les USA et la France et, par conséquent, au niveau des équilibres internes du bloc BAO. Les Français ont déjà pu goûter le poids de l’hostilité des USA lors de l’affaire brésilienne, qui, pourtant, n’est pas arrivée au terme. L’Inde est un morceau bien plus important que le Brésil (par ailleurs proche de lui au sein du BRICS), si l’on considère les ambitions US vis-à-vis de ce pays et le déplacement politique de l’Inde actuellement en cours. Pour les USA, le choix du Rafale dans un contrat de cette importance apparaîtra, à cette lumière, comme une « déclaration d’indépendance » de l’Inde, équivalente en un sens à une « déclaration de guerre » dans le champ de la communication et des grandes orientations politiques. La « question intéressante », plus précisément, est de savoir si cette affaire Inde-Rafale va jouer un rôle déstabilisant à cet égard, en conduisant la France (plutôt que les Français, dans leur direction politique) à un rapprochement politique fondamental. » [6]

Toute proportion gardée, outre ce que l’on peut considérer comme un « assaut de grande ampleur » contre le Système avec en plus de la décision indienne de poursuivre ses achats de pétrole iranien (12 % des importations pétrolières de New Delhi) avec des devises autre que l’euro-dollar, de (re)lancer le processus du troc avec la transaction « or contre pétrole » qui va – ou a la capacité de – détruire l’argent artificiel et virtuel, la planche à billets et tout le système financier obsolète étant le fondement du Système, et par extension de provoquer la continuité de l’effondrement du Système, ce dossier MRCA peut se représenter comme étant une « attaque » virale d’un système antiSystème contre le Système. Cette « attaque » est virale par le fait qu’elle peut destabiliser la coopération franco-américaine, destructurer le Système.

Bien qu’il conviendrait, judicieusement pour l’instant, de remplacer les termes assez forts d’« assaut de grande ampleur » et d’« attaque » par « tentative », étant donné que nous ignorons encore les effets et les conséquences de l’impact de ces « tentatives » contre le Système. Cependant, l’on pourrait supposer que les effets et les conséquences de l’impact de l’« assaut de grande ampleur » ne devraient plus tarder à se manifester.

« […] l’option « or contre pétrole » serait sans doute nécessairement d’application, puisqu’elle évite les circuits financiers alors que, dans cette option, la mise en place de circuits financiers et d’échange hors-bloc BAO n’aurait pu être encore organisée entre les puissances concernées. Quoi qu’il en soit, même si le calendrier normal est respecté, il semble bien que l’option « or contre pétrole » aura sa place dans le système qui s’ébauche, introduisant une notion théorique puissante de lien structurel entre acheteurs et vendeurs de pétrole, puisque l’or doit circuler entre acheteurs et vendeurs pour permettre la poursuite des transactions.

Nous ne sommes plus dans le domaine fantasmagorique de la planche à billets et des circuits informatiques boursiers mais dans le domaine concret de la matière, ressource concrète contre ressource concrète. Il y a donc la nécessité théorique d’équilibrer structurellement les transactions (importations d’autres produits des acheteurs de pétrole vers l’Iran, pour que l’or circule effectivement selon une « voie à double sens », chaque pays voulant conserver des réserves en or devenues aujourd’hui si nécessaires en regard de la « singerie » que deviennent les monnaies). Cela implique des liens commerciaux et économiques, c’est-à-dire, dans le contexte général de crise politique extrême voulu par le bloc BAO, des liens politiques conduisant à la formation de facto d’un « bloc » où se trouverait évidemment l’Iran, mais où l’on trouverait des puissances telles que la Chine, l’Inde et la Russie. » [7]

Dans un exercice de spéculation relative, il apparait donc, que dans le premier cas, c’est-à-dire de l’« assaut de grande ampleur », d’autres nations comme la Corée du Sud, le Japon pour l’Asie, l’Espagne, la Grèce et l’Italie pour l’Europe et surtout pour l’Union européenne qui a déjà fait le choix d’un embargo sur le pétrole iranien ; et qui pourrait elle-même faire l’objet d’un embargo de ses importations de pétrole de la part du régime des mollahs ; et, ici s’arrête la spéculation, d’autres grandes puissances de premier plan comme la Chine et la Russie, ne cacheront peut-être pas très longtemps leur intention de suivre la voie du troc tracée par l’Inde avec la transaction or contre pétrole. L’on peut presque affirmer que cette « tentative » de l’offensive indienne contre le Système n’en restera pas une, dans tous les sens du terme, très longtemps.

Dans le cas russe, cela avance dans ce sens comme en témoigne Seyed Mahmoud-Reza Sajjadi, l’ambassadeur iranien à Moscou qui « a fait part de la suppression du dollar, dans les échanges commerciaux entre l’Iran et la Russie. Le Rial et le Rouble remplaceront désormais le dollar dans ces échanges, conformément à un accord conclu entre les deux parties. […] Rappelons que début janvier le président américain Barack Obama a promulgué une loi de financement du Pentagone qui renforce les sanctions contre le secteur financier de l’Iran. Les nouvelles mesures prévoient d’autoriser Obama à geler les avoirs de toute institution financière étrangère qui commercerait avec la Banque centrale iranienne dans le secteur du pétrole. » [8]

Conclusion

Dans L’Écclésiaste, chapitre 10 sagesse ou folie, proverbe 26.27, il est écrit « Celui qui creuse une fosse risque d’y tomber lui-même, et combien plus s’il voulait tendre un piège à autrui. » Et dans ce piège tendu à l’Iran, c’est le bloc américano-européen qui s’y précipite en courant, encouragé par l’administration Netanyahou. Et à vouloir se montrer fidèle à soi-même, sans prendre en compte la réalité de notre époque tout en méprisant ses anciens alliés/Etats-vassaux pour n’en faire que des pions stratégiques dans son jeu, ici sa rivalité hégémonique contre la Chine, les Etats-Unis soutiennent eux-mêmes leur déclin, entretiennent eux-mêmes la dissolution de leur impérialisme et accentuent l’effondrement général du Système par auto-destruction et déstructuration. La dislocation géopolitique mondiale se poursuit infatiguablement et associe à elle la dislocation géoéconomique mondiale.

Les forces convergentes de la multipolarisation se renforcent encore, s’étendent à nouveau et s’insinuent lentement mais sûrement à l’intérieur des fondations poreuses du « vieux monde » unipolaire à la dérive, et poussent les Etats-vassaux et alliances plurinationales (type UE) de l’empire états-unien à faire un choix crucial entre la chute certaine aux côtés du colosse aux pieds d’argile ou saisir l’opportunité offerte par les puissances émergentes de se démarquer et d’entrer dans un « nouveau monde ». Cela nous ramène une fois de plus à l’importance cruciale pour l’Europe, mais aussi pour tout Etat de ce monde, de se défaire au plus vite de ses liens états-uniens ou c’est l’effondrement du Système qui les emportera tous. Si parfois l’on espère que certaines choses changent, il faut admettre que certaines choses peuvent ne pas changer. Pas sans la volonté.

Ahmiri Saïd

Notes

[1] : Compétition MRCA

[2] : Inde : pourquoi le F-16 et le F-18 ont-ils perdu l’appel d’offres ?

[3] : Danse échevelée et stratégique USA-Inde, autour de la quincaillerie MRCA

[4] : Hillary, le JSF, l’Inde et la narrative comme stratégie

[5] : Why India chose to disappoint the US

[6] : Un marché de durs

[7] : Notes sur la transaction « or contre pétrole »

[8] : L’Iran et la Russie suppriment le dollar de leurs échanges commerciaux

9 réponses à “L’offensive indienne contre le Système

  1. Ce sont des mercenaires indiens ( associés aux Qataris) qui ont eu la peau de Kadhafi , avec l’apport du mercenaire aérien OTAN !… Pourtant, le dirigeant libyen avait choisi de se rallier à une nouvelle monnaie « de réserve », le Dinar-or !… La décision de donner la préférence à des avions Rafale est peut-être dicté par d’autres considérations !…

    • Mercenaires indiens ? Lol
      Al Quaida est indien maintenant ?

      Tu postes depuis israel ou bien ?

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  5. Mais oui, toto, Al Qaïda est tout celà … même Français, s’il le veut !… Après tout, c’est la CIA qui a le copyright depuis 1980, sans doute une « grosse blague » d’un péquenot du Middle-West : çà se traduit par « le centre », ce qui est un blasphème pour un musulman : au centre du Monde, il ne peut y avoir que Dieu et comme il ne peut y avoir de Dieu que Dieu …… C’est bien une « pensée » d’US totalitaire, ceux qui croient que Dieu est avec eux !… Et des nazis ( « néo » ?) se font inviter en Israël, maintenant !…
    C’était quoi ta question ?… Yop, sur des vidéos , des « rebelles libyens  » fêtent la prise d’ une ville ( Benghazi, je crois ) en brandissant le drapeau de l’Union Indienne!… Ils ont dû confondre en le sortant de leur poche !… ( La présence des troupes venues du Qatar, plus personne ne la nie, y compris AVANT l’attaque de l’OTAN … c’est à dire en mars 2011, pendant que Fukushima explosait !… Mais alors, y-a-t-il eu seulement eu des Libyens pour participer à la « libération » de leur pays ou tout ceci ne fut-il qu’une monstrueuse mascarade pour écarter un soi-disant tyran soi-disant sanguinaire, mais surtout un gêneur et un homme libre !… Maintenant, nous allons voir si le martyr du Jugurtha moderne va embraser toute l’Afrique … et la lancer à l’assaut de la Méditerranée !…

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